Droit de Vote des Etrangers aux Elections locales: il est grand temps d’en discuter
Il est temps de lancer la discussion à Champigny sur cette question qui nous concerne tous. Le droit de vote aux élections locales à tous les étrangers après une durée minimale de séjour. Pour introduire la discussion nous publions sur notre blog de larges extraits d’une tribune parue en novembre 2012 sur Médiapart, écrite par Daniel Breuiller , Maire d’Arcueil, Gauche Citoyenne avec Francine Bavay, EE-LV, Michel Bock, Emmanuelle Cosse, conseillers régionaux d’Île-de-France.
« C’était une des « 101 propositions pour la France » de François Mitterrand en 1981 pour les étrangers non communautaires. Pendant que la France reportait sans cesse l’adoption d’une telle loi, onze pays européens accordaient le droit de vote aux élections locales à tous les étrangers après une durée minimale de séjour sur leur territoire (entre deux et cinq ans). Dans cinq de ces pays, les étrangers ont également le droit de se faire élire aux élections municipales.
Depuis quelques semaines, le gouvernement hésite sur cet engagement électoral de François Hollande pour les élections municipales de 2014. Il s’abrite derrière l’opinion publique : des sondages disent que les deux tiers des Français étaient pour l’octroi de ce droit il y a un an, et qu’ils ne sont plus qu’un tiers aujourd’hui. Ce ne serait donc pas le moment puisque la demande n’est pas forte… Et puis la majorité des 3/5e au Congrès n’est pas assurée… le droit de vote des étrangers, n’est pas un problème, mais une solution, vitale, essentielle, maintenant !
Vitale, parce que nous constatons un essoufflement démocratique de plus en plus fort depuis plus de 10 ans. Ce nouvel apport au corps électoral pourrait se révéler central en terme de renouveau démocratique. C ‘est aussi le sens des prises de position de plusieurs maires de grandes villes, comme Bertrand Delanoë, Didier Paillard, Dominique Voynet.
Essentielle, parce que les étrangers participent à la vie économique, sociale, culturelle de notre pays. Ils contribuent par l’impôt aux ressources de nos communes. Ils contribuent à la vie citoyenne en étant responsables d’associations, délégués syndicaux, représentants de parents d’élèves, électeurs pour la désignation des conseils de prud’hommes… Comment accepter le maintien de ce statut de citoyen de seconde zone, et souhaiter en même temps que tous s’intègrent à la société française ? Persister à exclure les étrangers de l’acte citoyen minimal que constitue le droit de vote aux élections municipales serait plus qu’une erreur : une faute. Dans nos villes, des milliers de femmes et d’hommes issus de l’immigration et leurs enfants attendent ce signal fort d’une reconnaissance de citoyenneté, antidote contre un racisme toujours affleurant, rempart contre la droite qui flirte beaucoup avec l’extrême droite sur ce thème.
Essentielle encore, parce que le droit de vote contribue à un sentiment d’appartenance à la société française, non à sa nation. Le statut de citoyen dans une ville ne doit pas être lié à la nationalité. La république, et singulièrement, la république française n’implique pas la confusion entre nationalité et citoyenneté. La citoyenneté de résidence est une des revendications qui fonde les valeurs écologistes, elle est toujours d’actualité.
Maintenant, parce que la crise systémique mondiale dans laquelle nous baignons depuis 4 ans incite à l’égoïsme plutôt qu’au partage, au repli sur soi plutôt qu’à l’échange. On protège son pain au chocolat plutôt que d’essayer de le multiplier. La diversité culturelle devient dangereuse. Ne nous le cachons pas, le nationalisme, le racisme, l’islamophobie, l’antisémitisme, l’exclusion sont des idées qui avancent. Il y a péril en la demeure, dans un contexte de crise qui voudrait désigner des boucs émissaires aux difficultés sociales. Renoncer au droit de vote pour les résidents étrangers, ce serait capituler devant les pires arguments, et laisser le champ libre aux peurs et aux haines. Nous n’avons pas le droit, plus le droit, de laisser cette victoire à la droite et à l’extrême-droite. Comme écologistes, contribuons à faire évoluer l’opinion publique en menant une grande campagne intelligente, pédagogique, rassembleuse, optimiste et persévérante. Entreprenons les démarches pour une bataille large et unitaire. Les forces existent pour conquérir le droit de vote des étrangers et faire ainsi respirer la société de toute sa diversité. »
Contrairement à de nombreuses municipalités de gauche celle de Champigny ne s’est pas saisi jusqu’à maintenant de ce problème. Il est urgent qu’elle le fasse. Le débat parmi les citoyens est d’actualité. En publiant cette tribune nous agissons pour que le débat à Champigny se fasse au grand jour et s’élargisse.
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Bonjour,
Quelques remarques sur … les remarques de DL :
Pas d’accord avec l’ »excellent » Jacques Julliard : savoir si les étrangers sont demandeurs de ce droit de vote ? Mais pourquoi ? Imaginons que l’on est fait la même chose en 44 avec le droit de vote des femmes. Peut-être une majorité d’entre elles (pour diverses raisons que l’on ne va pas développer maintenant) l’auraient refusé.
Je ne vois pas le rapport avec la « participation dérisoire à la récente élection législative partielle ». Quant à parler de « mini tremblement de terre politique avec l’élimination du candidat PS au second tour ». Alors là je le mets à 0,0001 sur l’échelle de Richter…
Enfin « l’argument qui avance que la citoyenneté passe par la nationalité ». Plutôt d’accord pour les scrutins nationaux mais absolument pas sur les élections locales.
Et d’accord aussi sur « la frilosité de la municipalité de Champigny sur cette question qui est peut-être (j’aurais dit « certainement ») à rechercher dans l’histoire du PCF dont la doctrine et la pratique furent jusqu’aux années 1980 parfois ambiguës sur la question des étrangers et de la Nation ».
Bonne année à tous.
Eric
L’intervention de DL lance bien la discussion. Est-ce que le droit de vote aux élections locales intéresse vraiment les étrangers ? Il est vrai qu’il est permis d’en douter. A Champigny nombre de citoyens portugais (je dis bien citoyens de nationalité portugaise pas français issus de l’émigration) sont inscrits sur les listes électorales et en tant que citoyens membres d’un pays de la communauté européenne ont droit de vote aux élections municipales. En 2008 d’après les chiffres disponibles seuls 25% des inscrits portugais ont fait usage de ce droit. Pourquoi ne se sont-ils pas sentis concernés par cette élection? voilà la vraie question à laquelle il faudrait pouvoir répondre.
L’argument constitutionnel ne tient pas. Sont électeurs de droit au Sénat les Maires et Conseillers Généraux et de par la loi aucun étranger ne peut être maire ni conseiller général. Le collège électoral est complété par la désignation dans les communes importantes par les conseillers municipaux et au-delà par des délégués élus par le conseil à la proportionnelle des sièges détenus par les différentes listes.
En ce qui concerne le fait que Forum se soit abstenu de tout commentaire sur l’élection législative partielle qui concernait le canton de Champigny Ouest voici ce qu’il en est. Nous avons bien sur regardé attentivement les résultats. Une partielle se caractérise toujours par un taux d’abstention fort. Cette fois ci il a c’est vrai atteint des records. Pourquoi ? Nous pensons qu’il y a deux raisons profondes. D’abord quel qu’ait été le résultat il n’aurait en rien modifié le rapport des forces majorité-opposition à la chambre. C’est un élément qui ne pousse pas particulièrement l’électeur à se mobiliser. Ensuite il faut le dire le flou et les hésitations réelles ou ressenties par les électeurs de gauche quant à la réalisation des promesses de la présidentielles et le vide du programme de droite ont joué un rôle important dans la non-mobilisation des électeurs. Le désintérêt était net ; Le Front de Gauche qui espérait tirer un avantage de son attitude critique vis-à-vis du gouvernement Ayraud n’a ramassé que des miettes ne progressant que dans 4 bureaux sur 10. Fallait-il dans ce contexte essayer d’analyser des micro-glissements à l’intérieur d’un échantillonnage non représentatif. Nous avons jugé que non.
Quelques remarques :
Comme l’écrit l’excellent Jacques Julliard dans son éditorial de Marianne du 5 janvier, il serait intéressant de savoir ce qu’en pensent les intéressés eux-mêmes. « Les » étrangers sont-ils demandeurs de ce droit de vote ?
S’ils possédaient ce droit, « les » étrangers en useraient-ils plus que les électeurs français ? On peut en douter, à l’heure où le taux d’abstention ne fait que croître de scrutin en scrutin. A Champigny, la participation dérisoire à la récente élection législative partielle est édifiante et navrante (à ce propos, on peut regretter que Forum n’ait pas publié de commentaire et d’analyse sur cette élection qui a tout de même constitué un mini tremblement de terre politique avec l’élimination du candidat PS au second tour).
L’argument qui avance que la citoyenneté passe par la nationalité n’est pas irrecevable (même s‘il est le plus souvent énoncé par la droite !), d’autant plus que même limité aux élections locales le vote des étrangers permettrait à ceux-ci de contribuer à élire indirectement une partie du Parlement, en l’occurrence le Sénat, ce qui peut poser un problème constitutionnel. Je pense donc qu’il faut plutôt aller dans le sens d’un assouplissement des règles de l’acquisition de la nationalité française, comme proposé par Manuel Valls.
Quant à la frilosité que vous évoquez de la municipalité de Champigny sur cette question, elle est peut-être à rechercher dans l’histoire du PCF dont la doctrine et la pratique furent jusqu’aux années 1980 parfois ambiguës sur la question des étrangers et de la Nation (les derniers épisodes en date étant l’affaire du « bulldozer de Vitry » et les propos de Marchais en 1981 sur la nécessité de « stopper » l’immigration).
Est que l’on connait l’influence qu’aurait le vote des étrangers à CHAMPIGNY? C.A.D. QUEL POURCENTAGE représenterait ces votants étrangers. Car si la mairie n’a pas encore abordé ce sujet c’est peut être qu’elle a peur (non sans raison) que d’ici quelques années les étrangers soient plus nombreux a voter que les campinois d’origine et qu’ainsi la mairie soit dirigée par un conseil municipal en grande partie étranger. Et à ce moment là M. ADENOT n’aurait plus les mêmes pouvoirs !!!! Personnellement je pense qu’il faut d’abord faciliter et inciter les étrangers a adopter la nationalité française afin de pouvoir voter si toutefois ce problème les intéresse.
Réflexion sur le droit de vote aux non communautaires.
Donner le droit de vote aux étrangers est une décision qui remet en cause le principe de citoyenneté française* ! De nombreux arguments militent en faveur de l’obtention du droit de vote par l’acquisition de la nationalité française plutôt que de recourir à une loi imparfaite comme on nous la propose. Une loi sur le droit de vote des étrangers non communautaires ne permettra pas, à un étranger d’être élu maire ou adjoint, il pourrait éventuellement devenir conseiller municipal mais cet immigré ne participerait pas à l’élection des sénateurs, réservée aux grands électeurs (députés, conseillers municipaux, généraux et régionaux) dans ces conditions, nous aurions des conseillers municipaux à deux vitesses. Il y a fort à parier que rapidement des droits équivalents seraient accordés et dans ce cas, le communautarisme surgirait pour influer sur le choix des sénateurs et du président de la République au travers des parrainages. C’est irréaliste.
J’ai vécu longtemps à l’étranger où je payais mes impôts, mais il ne m’est jamais venu à l’esprit d’exiger de participer aux élections locales, je m’interroge de savoir dans le cas où la loi passerait, qu’elle serait la position des pays concernés à l’égard de la réciprocité du droit de vote ?
Donner le droit de vote lors des élections locales (municipales) aux extracommunautaires dit-on ! C’est faciliter leur intégration, et c’est normal ils paient des impôts …. ?
Si tel est le but, mieux vaut les encourager à demander directement la nationalité française, et nous reconnaissons que ceux qui ont choisi cette démarche, ont réussi leur intégration. Que les thuriféraires de la gauche comme Yannick NOAH commencent à payer en France leurs impôts avant de vouloir donner des leçons.
Le droit de vote aux élections locales ne s’achète pas avec les impôts locaux, car ces mêmes étrangers paient aussi des impôts nationaux, donc ils seraient en droit d’exiger de participer aux élections nationales … d’ailleurs cela reviendrait à instaurer le vote censitaire. Le paiement des impôts participe à l’utilisation des services publics mais n’est pas attaché au droit de vote.
Cette loi entraine donc une modification de la constitution, elle peut être initiée par le président de la République et doit être approuvée par référendum ou par la majorité des 3/5e des suffrages exprimés des deux chambres du Parlement réunies en Congrès. Dans le cas actuel, la majorité nécessaire est de 555 voix alors que la majorité n’en a que 523 !
Tout ce tapage médiatique n’est qu’un écran de fumée, une manière d’éviter de résoudre les vrais problèmes, cruciaux de la France, APPRENTISSAGE, EMPLOI, METIER, COMPETITIVITE, DESINDUSTRIALISATION… Un programme électoral, n’est pas un projet, tant pis pour l’engagement N° 50 de François Hollande qui était seulement le N°60 de Francois Mitterrand. A moins qu’il s’agisse d’un calcul électoral car il entraine une augmentation de 6% du corps électoral c’est peut-être important pour la gauche afin de gagner, les municipales de 2014.
*(Pour les résidents communautaires la citoyenneté européenne est prise en compte, depuis le traité de Maastricht adopté par la France en 1992).
Le commentaire de M. Alain Chevalier m’amène à préciser mon point de vue.
On n’émigre pas de gaité de cœur. On ne quitte pas volontiers son pays d’origine, ses proches, ses habitudes ; Quand on le fait c’est contraint et forcé soit pour des raisons économiques, trouver du travail, nourrir correctement sa famille, soit pour des raisons politiques (guerre civile, instabilité, répression politique, religieuse, ethnique).
Parmi les migrants qui arrivent dans notre pays certains peuvent, au bout de quelques années, désirer y rester définitivement et devenir citoyens français. Acquérir la nationalité française est difficile. Les démarches sont longues, compliquées, la bureaucratie se montre tatillonne. Certains réussissent d’autres pas sans qu’on décèle entre deux cas pourquoi l’un a été accepté l’autre pas. Il est urgent de simplifier les démarches de les rendre plus claires, de préciser les causes des refus.
Parmi les migrants il y a aussi des gens qui tout en vivant en France ne souhaitent pas devenir citoyens français. Ils travaillent, vivent de longues années en France mais veulent garder la nationalité de leur pays d’origine, voire y retourner un jour.
Tous vivent et travaillent en France, y paient des impôts, contribuent à la vie économique du pays. Leurs enfants fréquentent les écoles françaises. Il est normal que après un temps de séjour (5 ans paraît un délai normal) ils puissent voter aux élections municipales là où ils résident.
Il ne faudrait pas que la France qui avait inscrit le droit de vote des étrangers dans la constitution de 1793 soit à la traine aujourd’hui. Il a fallu attendre 1968 pour que des étrangers puissent être élus délégués syndicaux. La participation des étrangers des pays de la communauté européenne aux élections municipales était inscrite dans le Traité de Maastricht (1992) mais la France « oublia » d’appliquer cette obligation aux municipales de 1995 et fut le dernier pays de la communauté à donner ce droit aux étrangers communautaires (municipales de 2001) ;
Accorder le droit de vote aux résidents étrangers faisait partie des propositions du candidat Mitterrand en 1981, du candidat Hollande en 2012. Va-t-on encore « oublier » cette promesse ?
Donner le droit de vote aux municipales c’est maintenant pourrait-on parodier mais le droit de vote ce n’est pas tout. Il faut que les résidents étrangers puissent acquérir la maîtrise de la langue française, connaissent leurs droits et leurs devoirs. Et là il faut reconnaitre que les moyens mis à la disposition par l’Etat sont très faibles. L’essentiel est basé sur le bénévolat de certains. C’est louable mais insuffisant pour que l’ensemble des migrants s’intègrent. Voter aux municipales ce serait un pas important d’intégration mais il faut aussi des moyens supplémentaires pour vraiment intégrer les migrants.
@cmoisy
Vous dites « si la mairie n’a pas encore abordé ce sujet c’est peut être qu’elle a peur (non sans raison) que d’ici quelques années les étrangers soient plus nombreux a voter que les campinois d’origine ».
Alors dites moi ce qu’est un « campinois d’origine ». Il faut avoir combien d’année d’ « ancienneté » ? Ce n’est pas sérieux. Il y a des étrangers qui sont bien plus « campinois d’origine » que des campinois français, arrivés récement sur la commune. Votre remarque a un petit gout de xenophobie dans la mesure où vous sous entendez clairement que le « campinois d’origine » est, de facto, français.
Par ailleurs, il est bon de préciser que dans ce débat, il est évidemment question d’étrangers en situation régulière. Les opposants aiment bien créer la confusion…